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18 March 2021

Rencontre avec le service informatique : partenaire stratégique des entreprises du groupe Terre

Œuvrant en coulisses pour que nos machines tournent rond, le service informatique du groupe Terre passe plus de temps dans l’ombre que sous le feu des projecteurs. Réactif et efficace lorsqu’il a fallu basculer en mode distanciel en mars 2020, le service IT a l’habitude de travailler en mode « challenge ». Apporter aux entreprises du groupe Terre des solutions technologiques innovantes qui prennent en compte l’aspect humain et offrent un retour sur investissement, c’est un sacré défi, non ? Un défi que nous explique Richard Talom, directeur du service.

Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Richard Talom – Je suis le directeur du service informatique du groupe Terre. Je travaille pour le groupe depuis 23 ans. J’y suis entré pour faire mon stage de fin d’études en électronique, option automation. Puis j’ai été engagé pour m’occuper de l’informatique. C’est mon premier boulot, je l’occupe avec bonheur depuis tout ce temps et j’espère encore pour longtemps.

Comment présenterais-tu le service informatique du groupe Terre ?

Aujourd’hui, le service informatique représente quatre temps pleins, dans quatre domaines complémentaires. Le poste de help desk, occupé par une informaticienne, prend en charge les tâches les plus courantes de l’informatique et répond aux questions des utilisateurs concernant le matériel ou les logiciels. Un deuxième poste s’occupe principalement de la création et de la maintenance des sites web. Le poste de gestionnaire de traitement de l’information est en charge de l’exploitation des bases de données et de développement. Enfin, ma fonction est initialement liée à l’infrastructure informatique du groupe (une infrastructure assez complexe puisqu’on est à ce jour physiquement basé sur quatre sites d’exploitation interconnectés) et à tous les aspects liés à la sécurité informatique. Je prends aussi en charge la gestion de l’équipe et des projets.

Le service IT est le prestataire au niveau informatique de l’ensemble des sociétés du groupe Terre, aujourd’hui au nombre de treize. Un petit nouveau nous a rejoint début d’année, BatiTerre : il n’est pas totalement interne puisqu’il n’est pas basé sur l’un des sites du groupe Terre. On le considère donc comme un client externe, qui bénéficie de l’infrastructure du groupe.

On travaille aussi avec un réseau de fournisseurs, le provider Internet par exemple ou des fournisseurs de logiciels. Chaque fois qu’on a un besoin de logiciel, on se pose la question de voir s’il vaut mieux le développer nous-mêmes ou faire appel à un prestataire externe qui, à partir d’une version standard, arrivera à le personnaliser dans la limite des coûts supportables par le groupe.

Quels sont les défis technologiques sur lesquels travaille actuellement le service informatique pour les différentes entreprises du groupe Terre ?

Le côté matériel a tendance à fondre. Au début, je marchais en permanence avec un tournevis à la main ; on a monté des PC, on les a cassés dans tous les sens pour essayer de les faire fonctionner. Ce n’est plus ce qui nous résume aujourd’hui. La machine s’est démocratisée, notre politique de remplacement est beaucoup plus systématique, sans passer son temps à essayer de dépanner. Le travail de l’informaticien aujourd’hui est d’arriver à exploiter ce que la machine permet de faire, c’est-à-dire traiter l’ensemble des données accumulées grâce aux logiciels utilisés. C’est vraiment la niche qui va orienter le cœur du métier du service IT dans les dix prochaines années.

On parle de deux notions capitales aujourd’hui : la digitalisation et la transformation digitale. Par digitalisation, j’entends le fait de pouvoir stocker numériquement une série de données : le scanning, les emails, toutes ces sources d’informations qui permettent d’avoir des données stockées sous format numérique. Depuis une bonne dizaine d’années, le groupe Terre a fait un gros travail de ce côté-là. J’en veux pour preuve que, quand on s’est retrouvé courant 2020 à être confiné, on n’a pas eu beaucoup de choses à mettre en place pour arriver à télétravailler car l’information était globalement disponible.

La transformation digitale désigne la même notion, vue sous un autre angle. On ne parle plus uniquement de données, mais d’une évolution de chacun d’entre nous dans nos manières de travailler. C’est vraiment une culture d’entreprise qui doit évoluer et s’orienter vers le mode de fonctionnement actuel où on a accès à tout, tout de suite, tout le temps, partout et sur n’importe quel support. Tout le monde aujourd’hui a un smartphone, une tablette… les supports sont différents et on voudrait, de la même manière qu’on peut travailler d’un PC, pouvoir faire certaines choses à partir du device qu’on a dans les mains. Ce sont toutes ces notions-là qu’il faut arriver à mettre ensemble, en veillant à ce que tout le monde suive le mouvement. Je ne crois pas qu’il faille faire une rupture et basculer complètement d’un système à l’autre.

La digitalisation s’est faite progressivement, elle aussi. Quand je suis arrivé dans le groupe Terre, il y avait un seul photocopieur et une seule boîte email pour l’ensemble du groupe. On avait déjà plusieurs sites d’exploitation avec des serveurs répartis à gauche à droite. Un gros effort a été fait pour tout centraliser sur un seul site et créer des interconnexions afin que l’information soit unique. Maintenant que l’information est unifiée, il s’agit de la rendre disponible en tout lieu, en tout temps. La population des travailleurs a bien évolué ces vingt dernières années : une nouvelle génération arrive et fait évoluer la culture. Le service informatique doit non seulement s’adapter à cette évolution, mais aussi être avant-gardiste et anticiper ces questions de manière à répondre aux besoins au fur et à mesure qu’ils se présentent.

En termes de logiciels, le groupe Terre s’est bien équipé ces dix dernières années. Mais dix ans, en informatique, c’est long car les outils évoluent en permanence. Chez Co-Terre par exemple, on utilise un ERP (progiciel de gestion intégré) nommé Odoo depuis une bonne dizaine d’années. Jusqu’à présent, nous étions restés sur la version 7 alors qu’Odoo en est maintenant à sa version 14. Le besoin d’évoluer ne s’était pas présenté jusqu’à maintenant, mais on se rend compte que les nouvelles fonctionnalités peuvent aider le travailleur à être encore plus numérique, lui apporter une plus-value en supprimant certaines tâches quotidiennes d’encodage par exemple. En glissant une facture dans un ERP, une série d’informations sont automatiquement reconnues, qu’il ne reste qu’à valider. Mais passer de la version 7 à la version 14, c’est un grand saut : il y a trop d’incompatibilités pour que la migration puisse se faire en un clic. Nous sommes donc presque en train de reconstruire l’ERP.

Mettre à jour Odoo chez Co-Terre était notre première expérience dans cet outil. Un chantier qui nous est utile pour d’autres sociétés du groupe puisqu’il nous permet de nous former et de nous préparer aux challenges futurs. Par exemple, équiper les magasins de vêtements de seconde main Terre. Un projet pilote a été lancé il y a bientôt deux ans dans certains Factory Shopping. L’objectif premier était simplement d’introduire l’ordinateur dans les boutiques. Pour les vendeur·euse·s, passer de la caisse manuelle à l’ordinateur est un gros changement ; certain·e·s ne sont pas habitué·e·s à l’outil informatique. Pour mettre en place un nouveau projet, arriver avec une solution toute faite et des procédures très carrées, ça ne passe pas toujours facilement. On préfère donc avancer par étapes et amener les choses en douceur. Aujourd’hui, on est certain que la solution a été acceptée partout où elle a été testée. Reste maintenant à faire évoluer le logiciel afin d’aller plus loin en termes de remontée d’informations : on teste actuellement le module caisses d’Odoo.

De son côté, Récol’Terre a choisi, il y a bientôt dix ans, d’informatiser toute son activité (collecte du verre, des PMC et du papier-carton en porte-à-porte et transport des conteneurs des recyparcs). Jusqu’alors, un gestionnaire fournissait au chauffeur une série de documents à compléter durant sa tournée que le gestionnaire devait ensuite encoder. En 2013, quand Récol’Terre est rentré dans le marché de collecte des conteneurs, les contraintes en termes de délais d’enlèvement et de livraison étaient rigoureuses. Si on n’avait pas investi dans l’informatique embarquée dans les véhicules, même en étant le gestionnaire le plus ingénieux, je ne suis pas sûr qu’on aurait pu respecter notre contrat. Avoir informatisé les véhicules concernés par cette activité a permis de respecter ce morceau de cahier des charges parce que l’information remontait en temps réel du terrain vers les bureaux et que la communication s’établissait entre les différentes parties. C’est comme ça que, de fil en aiguille, on a informatisé toutes les activités de Récol’Terre : les chauffeurs, qui auparavant notaient tout sur un papier, ont pris l’habitude de communiquer via un ordinateur installé dans leur véhicule. Pour eux, c’était aussi un gros changement.

Après cette phase de digitalisation, le défi sur lequel on travaille aujourd’hui chez Récol’Terre consiste à passer à la phase des tournées dites « guidées ». Le principe est d’enregistrer au fur et à mesure une tournée modèle effectuée par un chauffeur expérimenté, dans les meilleurs temps possibles en respectant toutes les réglementations en vigueur. Après analyse, correction et validation du modèle avec le chauffeur concerné, cette tournée pourrait être réexpédiée dans le véhicule afin de permettre à un chauffeur intérimaire ou remplaçant, qui ne maîtrise pas nécessairement la tournée, de l’effectuer dans des temps presque similaires à ceux du chauffeur titulaire. L’idée est de profiter de l’outil informatique pour gérer la problématique des congés et des absences non prévues et d’essayer de maintenir les performances de collecte obtenues par les chauffeurs titulaires. Car on sait qu’entre juillet et septembre, on est généralement en dessous des performances prévues. Cette fonctionnalité-là, nous ne l’obtenons pas avec notre fournisseur actuel d’ordinateurs de bord. Nous testons un autre outil et espérons avoir implémenté la solution pour le mois de juin afin de maintenir, dès cette année, nos performances pendant la période des congés.

Pour la récupération du textile, Terre asbl prépare ses tournées et gère toutes ses ressources (les chauffeurs, les véhicules, les capteurs, les bulles…) grâce à un logiciel de collecte très performant. Toutes les bulles à vêtements sont géolocalisées afin que, une fois la route d’une tournée dessinée, le chauffeur suive son itinéraire sur GPS. Certaines bulles sont également équipées de capteurs de niveau de remplissage. Partant de cette expérience, une idée a germé en réponse à une évolution du marché : les grandes enseignes de vêtements sont de plus en plus nombreuses à collecter les vêtements usagés au sein même de leurs magasins, en échange d’une réduction sur un prochain achat. Les clients sont donc incités à donner leurs vêtements dans ces grandes chaînes plutôt que dans nos bulles. Terre asbl cherche un incitant similaire, qui donnerait envie aux donateurs d’utiliser nos bulles. Nous nous sommes donc mis à chercher un système qui nous signalerait que quelqu’un a mis quelque chose dans la bulle et, en retour, que cette personne reçoive à l’instant même un bon d’achat à faire valoir dans une chaîne de magasins qui ferait partie du projet. On a pensé aux capteurs, mais la notion d’immédiateté pose problème : pour être concurrent face à la chaîne de magasins où le client vient physiquement et reçoit un bon, il faut que l’information revienne quasiment immédiatement à la personne qui est devant la bulle. L’idée serait de proposer une application pour smartphones, mais encore faut-il convaincre les gens de la télécharger… Au-delà de l’aspect technique, il y a donc un aspect communication-marketing à développer : comment faire en sorte que télécharger l’application Terre n’apparaisse pas comme une contrainte ? Certains aspects restent à travailler pour parvenir à une solution globale convaincante pour tous les utilisateurs (pas uniquement les convaincus qui connaissent déjà Terre).

On a également imaginé utiliser des radio-étiquettes (des puces RFID) qu’on distribuerait dans nos magasins et que le donateur mettrait dans son sac avant de le déposer dans une bulle. Pour que la puce soit lue à son entrée dans la bulle, il faudrait que toutes nos bulles soient équipées de lecteurs, ce qui risque d’être impayable. On peut imaginer de centraliser les solutions de lecture en équipant nos camions de lecteurs. D’après les essais que nous avons faits, la lecture n’est pas optimale : on n’atteignait même pas les 50 %. Si ce sont nos ateliers de tri qui sont équipés en solutions de lecture, on sort à nouveau de cette idée d’immédiateté et on n’est pas certain non plus de s’approcher des 100 %, d’autant plus que toutes nos collectes ne sont pas nécessairement triées dans nos centres de tri. Toutes ces questions doivent être prises en compte avant d’opter pour une solution technique.

Comment vois-tu l’évolution du service IT au sein du groupe Terre ? Son rôle par rapport aux entreprises du groupe est-il en train de changer ?

Jusqu’au début des années 2000, le service informatique avait toujours été présenté comme un centre de coûts. Avec les évolutions actuelles, on essaye d’inverser la tendance pour aller vers un centre de profits, ce qui signifie que nos activités doivent permettre au groupe d’avoir rapidement un retour sur investissement. Il ne s’agit pas de dire qu’on va tout numériser pour arriver à dix personnes en moins, loin de là ! L’objectif est plutôt de consolider ce qu’on a aujourd’hui et d’amener tout le monde à évoluer.

Dans le groupe Terre, beaucoup de personnes travaillent sans ordinateur. En 2020, beaucoup de nos réunions ont dû être annulées pour respecter les mesures sanitaires. Certains secteurs ont pu tenir leurs réunions en visioconférence, mais tous les membres du personnel ne sont pas nécessairement équipés pour passer à une formule en ligne. Le service IT va-t-il travailler à réduire la fracture numérique au sein du groupe Terre ?

Cela ne concerne pas uniquement le groupe Terre. Si on prend le secteur des banques, la fracture est encore plus brutale. Il y a de moins en moins de guichets où on peut poser une question gratuitement. Certains – des personnes d’un certain âge, mais des plus jeunes également – ne savent pas utiliser un smartphone pour consulter leur compte ou faire une transaction.

Au niveau du groupe Terre, pas mal de secteurs sont équipés d’outils informatiques qui aident les travailleurs à faire leur travail. Le but n’est pas qu’ils soient des as de l’informatique, mais de leur permettre de sortir les informations qui les intéressent. Au tri textile par exemple, depuis une quinzaine d’années, chacun enregistre son travail sur des bornes placées dans l’atelier qui permettent in fine de gérer les différents flux (entrées et sorties), mais aussi de jauger qui fait quoi dans l’atelier.

Du point de vue de la production, le groupe Terre a toujours mis tout en œuvre pour que ce soit le plus simple possible à utiliser pour les personnes. Si on place un ordinateur de bord dans un véhicule, on prévoit des traductions dans les langues les plus courantes pour être certains que le chauffeur puisse au moins suivre le GPS et dialoguer avec son dispatcher sans intermédiaire.

Mais c’est vrai qu’il reste du chemin à faire. Pendant le confinement, on a mis en service l’envoi des fiches de paye électroniques. Aujourd’hui, environ 40 % des membres du personnel ont opté pour un envoi électronique. Pourtant la démarche n’est pas compliquée et j’estime que 90 % de notre personnel a un smartphone et une adresse mail. Qu’est-ce qui fait que certains travailleurs veulent continuer à recevoir leurs documents papier ? Je peux comprendre que certaines personnes soient réticentes à l’idée que leurs données soient stockées dans le nuage. Ce qui est surprenant, c’est que les plus réfractaires ne sont pas nécessairement ceux qu’on imaginait, en tout cas pas nécessairement des personnes concernées par la fracture numérique. On est parfois plus sur des questions de principe que de technologie. Il reste un travail de sensibilisation à faire car l’enjeu est écologique aussi. Tout ce qu’on peut faire pour diminuer notre empreinte écologique doit être fait.

Qu’aurais-tu envie de faire passer comme message aux jeunes qui s’engagent dans leur vie professionnelle ?

L’informatique est un secteur plein de perspectives. La niche se trouve aujourd’hui dans le big data, dans l’intelligence artificielle. Stocker de l’information sans pouvoir s’en servir ne sert à rien. Le rôle de l’informatique est aujourd’hui plus stratégique : en croisant les données, on devient un réel support stratégique pour l’entreprise.

Quelles sont tes sources de satisfaction, tes motivations ?

Ce qui me motive, c’est la diversité du métier, les contacts au quotidien et les challenges. Je dis toujours en rentrant chez moi que j’ai passé ma journée à écouter des problèmes. Ça n’a jamais été un poids pour moi. Au contraire, le fait de ne pas toujours répondre à toutes les questions me motive souvent à essayer de comprendre et à trouver des solutions.

Propos recueillis le 23/02/2021 par Geneviève Godard

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